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fort contents du lama qui en est le maître, et qui n’avait alors que 25 à 26 ans : loin de vexer ses sujets, il ne tirait de chaque famille qu’un léger tribut, à proportion de l’emplacement qu’elle occupait.

On dit qu’il y a quelque différence dans le langage de ces deux sortes de Si fan, mais comme ils s’entendent suffisamment pour commercer ensemble, on peut croire que ce qu’il y a de différence, ne consiste que dans les dialectes d’une même langue.

Les livres et les caractères dont se servent leurs chefs, sont ceux du Thibet, pays du grand lama. Les uns et les autres ne sont qu’à demi soumis aux mandarins chinois leurs voisins, auxquels ils se présentent quelquefois lorsqu’ils sont cités, mais c’est ce qui est rare, et le plus souvent ils n’obéissent point. Il ne paraît pas qu’on ose user avec eux de rigueur, ni les forcer à l’obéissance. Les montagnes qu’ils habitent, dont le sommet est couvert de neiges, même au mois de juillet, les met à couvert de toutes poursuites.

Comme ils ont en leur disposition la rhubarbe qui croît en abondance sur leurs terres, ils se font rechercher des Chinois, qui les laissent sans peine en possession d’une si affreuse contrée, pourvu qu’ils puissent tirer d’eux la marchandise telle qu’ils la demandent.

Ils ont des manières et ils usent de cérémonies assez différentes de celles des Chinois : par exemple, c’est l’usage parmi eux de présenter un grand mouchoir blanc de toile ou de taffetas, quand ils vont au-devant des personnes qu’ils veulent honorer. Ils ont pareillement certains usages qui sont semblables à ceux des Tartares Kalkas, et d’autres qui approchent des coutumes de Coconor.

Le gouvernement présent des Si fan ou Tou fan est bien différent de ce qu’il était autrefois ; ils n’ont maintenant aucune ville, et ils sont resserrés entre le fleuve Ya long et le fleuve Yang tse kiang : anciennement leur royaume était fort peuplé, également bien fortifié et très puissant.

On voit par les livres chinois de géographie un peu anciens, par les histoires des provinces de Chen si et de Se tchuen, et par les grandes annales Nien y che, qu’ils ont eu une domination très étendue, et des princes d’une grande réputation, qui se sont rendus redoutables à leurs voisins, et qui ont même donné de l’inquiétude et de l’occupation aux empereurs chinois.

Du côté de l’orient non seulement ils possédaient plusieurs terres qui font maintenant partie des provinces de Se tchuen et de Chen si mais encore ils avaient poussé leurs conquêtes dans la Chine, jusqu’à se rendre maîtres de plusieurs villes que les Chinois nomment tcheou, et dont ils avaient formé quatre grands gouvernements. Du côté de l’occident ils étaient maîtres de tous les pays qui sont au-delà d’Ya long jusqu’aux limites de Cachimir. Telle était l’étendue de leur royaume.


630.

Dès le septième siècle le roi des Tou fan, nommé Ki tson possédait cette vaste étendue de terres ; il eut même plusieurs petits rois tributaires, auxquels il envoyait des patentes et des sceaux d’or. Il voulut s’allier avec la