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NOTES.

et les belles sculptures émaillées des frères della Robbia, de Florence, étaient depuis très-long-temps célèbres.

À tout autre que Palizzi, cette nouveauté, en prouvant, par son existence même, qu’on ne pouvait prétendre aux honneurs de la découverte, n’eût inspiré que le désir d’imiter, facile à satisfaire au moyen d’un voyage en Italie ; mais ce n’est pas ainsi que le génie procède.

Et moi aussi, nous semble-t-il lui entendre dire, je serai émailleur sur terre et créateur d’une industrie utile à mon pays ! Dès ce moment plus de repos, plus de famille ; pas de sacrifices, de privations, de fatigues personnelles, qui coûtent, jusqu’aux succès, non douteux dans la conscience des moyens et de l’opiniâtreté du grand artiste. Mais ce succès se fit attendre quinze longues, bien longues années ; et si, dans cet immense intervalle, encore agrandi par les soucis et la misère, il eût succombé à ses efforts surhumains et à des privations qui, dit-il, le « rendirent si écoulé en sa personne, qu’il n’y avait aucune forme n’y apparence de bosse aux bras ni aux jambes, » quel autre fruit ce grand homme aurait-il recueilli de sa généreuse résolution, que la pitié qu’inspire un fou ruinant sa famille, brûlant ses meubles et jusqu’aux planchers de sa maison[1], et se consumant lui-même pour colorer des tessons à la manière italienne.

Il faut lire dans ses Mémoires l’exposé candide de tout ce qu’il eut à souffrir pour lui et pour les siens, que, par une discrétion qu’on appréciera, il n’a nommés que ceux de ma maison, et dont il cherchait, par une gaîté factice,

  1. C’était vers le même temps, 1546, que le non moins artiste Benvenuto Cellini assurait à Florence la réussite compromise de la fonte de sa statue de Persée, en jetant dans le fourneau toute sa vaisselle d’étain, composée de 200 pièces, en partie travaillées sans doute comme celles de cette époque. La fougue des grands artistes et la concentration de leurs idées vers un seul but sont de tous les temps.