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FANTÔMES BRETONS


valets commencèrent par le chasser à coups de fouet, mais Robert le fit rappeler et amener devant lui, dans la grande salle. Job eut une peur épouvantable en se trouvant seul avec cet affreux borgne qu’il prit pour le terrible garde de la forêt, vu leur ressemblance.

— Je n’ai jamais volé de bois, s’écria-t-il, ayez pitié de moi.

— C’est justement, reprit le sire, parce que tu n’as pas volé que je vais te faire pendre : tu es trop honnête pour un pauvre ; allons, je vais préparer ta potence, ainsi repens-toi !

— Me repentir, dit Job ; de quoi faut-il me repentir ?

— Eh ! par la mort ! c’est de ne pas avoir volé.

— De ne pas avoir volé ; murmura Job en tombant à genoux ! Que voulez-vous donc que je fasse ?

— Je veux que tu voles mon bois, imbécile ; je suis le maître apparemment ; je t’y autorise, je te l’ordonne ; et si ce soir même en t’en allant tu ne me voles pas un beau fagot de bon bois, demain tu seras pendu.

— Pendu, répéta Job, pendu si je ne vole pas son bois !

Là-dessus Robert le borgne le poussa à la porte en lui faisant un signe terrible comme celui de serrer une corde autour du cou.

Franchement, comme disait le brave Florange, c’était un peu dur d’être pendu, parce qu’on n’était pas voleur. Voilà qui ne s’est peut-être jamais vu.

N’importe, une demi-heure après, Job, arrivé dans la forêt, se dit naturellement que, puisque le maître