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FANTÔMES BRETONS


Claude s’est mis à parler tout bas… Tout d’un coup, Jésus ! Julie a poussé un grand cri et elle est tombée à la renverse. Je l’ai portée dans son lit, de l’autre côté ; et, depuis, elle divague à faire trembler.

Ah ! quelles angoisses je ressentais à de tels récits ! Les plaintes de Julie-Marie me navraient ; ses paroles étranges et revenant toujours à la même idée me faisaient frémir, tant je redoutais d’en saisir le sens mystérieux.

Une autre fois, comme sa gardienne venait de sortir, Julie, sans me reconnaître, s’écria en me voyant approcher : — Je sais tout ! Claude me l’a révélé avant de mourir. Je vais te le confier, Catherine ; tu ne nous trahiras pas ; et puis, je compte lui rendre son argent… Le Saint-Gildas, tu sais bien ? s’est perdu le jour du vendredi saint. Claude et Jean se sont jetés à la mer pour se sauver, mais le capitaine…

À ces mots, j’essayai d’interrompre cette confidence qui ne me promettait que d’affreuses révélations. Ce fut en vain ; ma malheureuse amie me tenait le bras fortement serré et je ne pus ni m’éloigner, ni la réduire au silence. Elle continua ainsi : — Le capitaine avait attaché autour de ses reins une ceinture pleine d’or et d’argent, dont le poids le fatiguait beaucoup. Alors, se sentant couler à fond, il dit à Claude : — À moi ! je vais périr ; tiens, prends ma ceinture… sauve ton capitaine !… Oh ! Claude a été bien coupable !… Ensuite… Je ne me souviens plus… Je souffre encore davantage… Rends-lui son argent, Catherine… Laisse-moi en repos.