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LA CHAPELLE DE COAT-AR-ROCH


— Moi ? Rien, dit l’autre. Le bourgeois a promis de bien payer ; je ne veux savoir que cela.

— N’importe, reprit le jeune homme, cela ne me rassure guère.

— Bah ! tu es un poltron ! Et, au surplus, Falloc’h ne nous a-t-il pas dit tout à l’heure qu’il prenait tout sur lui ?… et que d’ailleurs la Nation avait décrété la suppression de tous les saints ?…

Le ciel commençait à s’assombrir : de gros nuages, chassés par le vent de la montagne, passaient au dessus de la chapelle et répandaient de l’ombre sous les voûtes. La bise gémissait de temps à autre, et faisait tinter faiblement la petite cloche dans la tourelle. Le jeune garçon soupira, en regardant tout autour de lui.

— Je ne suis guère tranquille tout de même, dit-il, et que deviendra le pauvre saint Roch, quand on l’aura mis hors d’ici ?…

— Le ci-devant saint Roch fera comme tous les mendiants de la paroisse : il ira piller le bois de Falloc’h et se chauffera à son compte.

— C’est égal, maître Pierre, vous devriez y regarder à deux fois, avant de… Seigneur Jésus ! voyez donc là, dans le fond : c’est un ange du paradis qui est à genoux devant la statue.

— Eh ! c’est une femme, imbécile ! s’écria le charpentier ; sœur Brigitte elle-même… Qu’importe, puisque Falloc’h a dit de ne pas faire attention à elle.

À ces mots, l’ouvrier, digne de celui qui l’avait envoyé, se mit à frapper de grands coups de hache sur une poutre de la charpente. Un cri de douleur