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LE FILS DU PILLEUR


il s’en alla courir à l’aventure sur le bord de la mer. Il se disposait à descendre, pour revenir à Lok-Irek, vers une baie au fond de laquelle on amarrait souvent des barques par le beau temps, lorsqu’il entendit parler assez fort et reconnut l’accent emporté de maître Christophe. Il s’éloigna instinctivement du sentier et se cacha parmi les grandes roches. Deux hommes s’approchèrent bientôt, gravissant la côte avec lenteur, à cause des paniers et agrès qu’ils portaient.

— Oui, pour sûr, patron, disait l’un des deux, voilà plus de dix fois que je vois votre petite aller là-bas vers la grève de Saint-Jean, sur le dos de ce vagabond.

— Il faut que tu me le dises pour que je le croie, tonnerre ! répondit Brionel… après ce qui s’est passé avec le pilleur…

— Oui, pas moins, c’est assez drôle, dit l’autre : le fils portant la fille de celui…

— Tais-toi, vieux gabelou ! Ça m’exaspère et je crois que je l’écraserais comme un cancre…

— Pas moins que vous fîtes, patron, dans ce temps-là, un crâne coup de fusil… J’y étais, et à votre seconde balle, malgré l’ombre, j’ai vu le damné pilleur, qui nageait comme un congre, faire une culbute de marsouin, que c’en était… Hein ? qu’est-ce que vous dites ?

— Moi, gabelou, rien : c’est la mer qui pleure ou le vent qui siffle dans les roches. Ça nous amènera de l’eau. Filons…

Non, ce n’était pas la mer qui pleurait, ni le siffle-