qui s’enfuyait éperdue, se croyant toujours poursuivie par son lâche persécuteur. Elle ne consentit à s’arrêter qu’aux supplications réitérées de M. Tanguy, et ne cessait de s’écrier d’une voix étranglée par la peur :
— Sauvez-moi, sauvez-moi, le voilà, l’entendez-vous ? Il vient…
— De qui parlez-vous ? mon enfant, lui dit le recteur ; personne ne vous menace ; apaisez-vous. Songez que je suis là… Ne me reconnaissez-vous pas ?
Ce ne fut qu’au bout de quelques minutes que la pauvre épouvantée parvint à vaincre son effroi.
— Maintenant que vous voilà à peu près remise, continua-t-il, dites-moi de qui vous parliez tout à l’heure. Qui vous poursuivait ? N’est-ce pas une fausse alarme ? Voyons, Anna, répondez sans crainte.
— Une fausse alarme ! dit-elle, une fausse alarme… Plût au ciel que cela fût ! Mais je l’entends encore me dire que Julien… Oh ! c’est affreux !
— Je devine que c’est ce méchant matelot qui vous a effrayée ce soir par ses menaces et ses faux rapports. Ce ne peut être que le Nantais ?
— Lui-même, M. Tang. Il veut la mort de mon mari ; il le fera périr, c’est sûr, si le malheur n’est déjà arrivé.
— C’est impossible, mon enfant ; vous oubliez que je veille sur mon troupeau. Le loup ne sera pas le plus fort ; ayez confiance et dites-moi bien vite ce qui s’est passé entre vous et Corfmat, car votre tante se meurt d’inquiétude à cause de votre absence.
Anna Morel fit en peu de mots le récit de son aven-