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FANTÔMES BRETONS


quand Yann, que les hurlements avaient réveillé, arriva dans le courtil.

— Qu’y a-t-il de nouveau par ici, dit-il à son frère ? J’ai senti le sang frais, je crois ?

— Peut-être, répondit Claudik, en lui montrant la main sanglante.

— Et la poire, où est-elle ? dit Yann en roulant des yeux verts.

— La voici, mon frère ; et nous en ferons quatre parts : une pour le père, une pour les sœurs, une pour toi, et la dernière…

— Un quart, c’est bien peu pour ma soif, interrompit le mauvais garnement : au surplus nous verrons. Et la main, que vas-tu en faire ?

— Chercher son maître et la lui rendre, car je ne veux pas garder le bien d’autrui. En attendant, je vais la frotter avec de bons Louzou et la mettre dans mon sac pour la conserver fraîche.

Claudik fit comme il avait dit ; mais Claudik, qui avait de l’esprit, fit encore autre chose : la lune venait de se lever et notre garçon se mit tout de suite en campagne, — avec la main coupée dans son sac, afin de trouver la piste du voleur de poires. Pendant plus d’une lieue, ce ne fut pas très-difficile, sur les landes et les collines, où il suivait une traînée de sang ; mais à mesure qu’il approchait de la forêt du Kranou, les traces devenaient moins visibles et enfin elles cessèrent tout à fait.

— C’est égal, se dit Claudik en revenant, on dit qu’un géant demeure au milieu de la forêt ; ce doit