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THÉOPHILE GAUTIER.

terme ! » Certes Gautier ne discuta jamais avec M. Rouher la valeur d’un mot, la coupe d’un vers ou la lettre d’appui, mais dans les dernières années du Second Empire il trouva — ce qui est plus important — des protections intelligentes qui le comprirent, l’adoptèrent et simplifièrent sa vie en la rendant moins pénible[1]. Par son travail régulier au Journal officiel, plus généreusement rémunéré, par une sinécure de bibliothécaire chez une princesse amie des lettres, il sortit enfin de l’atmosphère où il étouffait. Reçut-il, comme on l’a dit, une pension directement servie par le cabinet impérial ? je l’ignore, mais je ne le crois pas. Il n’eût pas, du reste, été le seul : Napoléon III goûtait peu la littérature et ne comprenait rien aux arts ; mais lorsqu’on lui signalait quelque bonne action à faire, sa générosité n’hésitait pas. Le budget annuel des bonnes œuvres — secourables et protectrices — pris sur sa cassette particulière était fixé à 3 500 000 francs10 000 francs par jour ; — les lettrés et les artistes de son temps ont pu le savoir. Que cet hommage rendu à la vérité soit à la louange du souverain déchu.

L’existence se montrait donc plus propice envers Gautier ; il put se croire pour toujours à l’abri des tracasseries et des difficultés qui le harcelaient depuis si longtemps ; de plus, toute quiétude semblait

  1. Par arrêté du 25 avril 1863. M. Rouland, Ministre de l’instruction publique, avait déjà accordé une indemnité annuelle de 3 000 francs à Théophile Gautier, qui, grâce à M. Jules Simon, la toucha jusqu’à sa mort.