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THÉOPHILE GAUTIER.

n’hésita pas à faire plus tard son mea culpa, lorsque sa bonne foi s’aperçut qu’elle avait été dupe d’elle-même. Ce que l’on a oublié aujourd’hui, c’est que le clergé, sans épouser ouvertement la querelle qui s’agitait entre les deux camps ennemis, penchait vers le romantisme et le soutenait sans trop de mystère. Cela n’a rien qui doit surprendre.

Le romantisme, logique dans son retour vers le moyen âge, reconnaissait franchement le Dieu des croisades et de saint Louis, au détriment des divinités païennes dont la poésie avait abusé jusqu’à la nausée. C’était là un motif qui n’était pas sans valeur ; mais il en était un autre, de conséquence plus grave et que l’on n’avouait guère, à demi-voix, qu’entre « sages et discrètes personnes ». Le goût du gothique, si longtemps proscrit comme barbare, renaissait avec une vivacité singulière. Les vieilles églises ogivales, en lancette, fleuries, flamboyantes, tombaient en ruines et le dédain public s’en souciait peu. On cria au vandalisme, on s’émut, on protesta, et le clergé appuya des manifestations qui devaient amener la restauration des édifices religieux éprouvés par le temps et le remettre en possession de ceux qui, depuis la Révolution, avaient cessé d’être consacrés au culte. C’est ainsi, sur cette voie détournée, que le mouvement romantique, poussé par un mobile étranger à l’art, sortit des ateliers où il était éclos et pénétra dans la bonne compagnie, qui, à cette époque, exerçait encore une certaine influence sur l’opinion. Le moyen âge fut à la mode ; je ne