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CHAPITRE IV

LE PRINCE IMPÉRIAL



PAPA GRÉVY. — LES POLITICIENS. — DÉFENSE À MAC-MAHON D’ASSISTER AUX OBSÈQUES DU PRINCE IMPÉRIAL. — DÉROUTE DU PARTI IMPÉRIALISTE. — VISITE À CAMDEN-PLACE. — L’IMPÉRATRICE EUGÉNIE. — SES RÊVASSERIES. — SUPERSTITIEUSE. — POURQUOI ELLE EST IRRITÉE CONTRE SON FILS. — LE PRINCE IMPÉRIAL. — AFFECTION FILIALE. — INDULGENCE. — HAINE CONTRE LE PRINCE NAPOLÉON. — PROMENADE SUR LA BRUYÈRE. — PROJETS DU PRINCE IMPÉRIAL. — DÉCENTRALISATION. — L’ELDORADO. — CONSPIRATION PERMANENTE. — IL N’ÉTAIT PAS HEUREUX. — PLAIE TOUJOURS SAIGNANTE. — SITUATION MORALE. — LA TUTELLE. — DÉPART POUR LE ZOULOULAND. — MORT DU PRINCE IMPÉRIAL. — LE GRAND DUC DE BADE. — REGRETS. — LE JOURNALISME RADICAL. — AURAIT-IL TENTÉ UNE AVENTURE EN FRANCE ? — TRADITIONS FRANÇAISES. — LES DEUX PARTIS. — LA MORT DE GAMBETTA. — SES FUNÉRAILLES. — LA MORT DE CHANZY. — LE COUP DOUBLE DE LA DESTINÉE.



LE choix du nouveau chef du pouvoir exécutif n’était pas mauvais. Grévy avait été un avocat d’affaires assez terne, mais écouté, bénéficiant d’un extérieur qui avait de l’austérité. Très attaché depuis longtemps à la forme républicaine, il était d’opinions modérées. Sa bonne tenue faisait croire à une intégrité qui, dit-on, avait quelques complaisances de famille. On savait qu’il n’était pas fier et qu’il aimait à faire sa partie de billard avec le bedeau de Saint-Roch, qui avait le carambolage ineffable ; on en concluait qu’il ne rechercherait les hommes que selon leur mérite ; on ne soupçonnait pas alors que son gendre précipiterait une chute qui n’eut rien de glorieux et qui n’a rappelé que de loin celle de Phaéton.

L’homme par lui-même, à l’époque où il prit officiellement possession de l’Élysée, était acceptable et fut accepté. Il avait de l’habileté, c’est tout ce qu’on lui demandait ; si son habileté n’était que de l’adresse, on ne s’en souciait guère ; il n’avait point de génie, de cela on était certain et l’on s’en réjouissait, car un homme de génie à la tête d’un gouverne-