Page:Du Camp - Souvenirs d’un demi-siècle, tome 2.djvu/259

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

guerre. » Là-dessus, je me suis dit : « Prenons Metz. » Et il a pris Metz.

Le 26 février, dans l’après-midi, les préliminaires de la paix furent signés à Versailles, sous réserve de l’approbation de l’Assemblée nationale. Le même jour, les princes allemands et les généraux réunis à Versailles allèrent porter leurs félicitations à l’Empereur.

Guillaume Ier annonça la nouvelle à l’impératrice Augusta, puis il adressa à l’empereur de Russie une dépêche, officielle cette fois et non plus familière, comme celle qu’il lui avait expédiée du champ de bataille de Sedan :

« C’est avec un sentiment inexprimable et en remerciant Dieu de sa grâce que je vous informe que les préliminaires de paix viennent d’être signés entre Bismarck et Thiers… Ainsi nous sommes arrivés au terme d’une guerre aussi glorieuse que sanglante, à laquelle nous avons été provoqués avec une frivolité sans égale. La Prusse n’oubliera jamais qu’elle vous est redevable de ce que la guerre n’ait pas pris des dimensions extrêmes. Soyez-en béni de Dieu ! Pour toujours votre ami reconnaissant. Guillaume. »

Il y a dans cette dépêche un aveu que rien, dans l’existence du souverain vainqueur, n’a jamais démenti. Il n’est pas question de l’Allemagne, dont cependant l’on est empereur ; on ne parle que de la Prusse, « qui n’oubliera pas les services rendus » ; Guillaume, en effet, était exclusivement Prussien et très peu Allemand ; cela explique pourquoi il a toujours tenu en suspicion son fils Frédéric, qui, élevé par sa mère, princesse de Saxe-Weimar, était Allemand, rien qu’Allemand, et pas du tout Prussien.

Les préliminaires signés à Versailles, le 26 février, furent soumis, dès le 28, à l’Assemblée nationale ; on résolut de les examiner d’urgence, le soir même, dans les bureaux et de les discuter le lendemain, en séance publique. On se hâtait et on se hâta si bien, que le 1er  mars, les articles du traité préliminaire furent acceptés — furent subis — par cinq cent quarante-six députés, contre cent sept. Cette fois, il n’y avait plus à y revenir, la guerre était close. Thiers avait habilement manœuvré ; son mot d’ordre, colporté de groupe en groupe, avait été écouté ; il avait fait comprendre pourquoi la rapidité s’imposait à tous les cœurs soucieux de la patrie, et l’on avait procédé aussi vite que pouvaient le permettre les usages parlementaires. Cette conclusion, pour ainsi dire