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l’homme ne veut plus payer le tribut à une patrie ingrate ou abusée, » et il ajoute : « la beauté et la vertu n’ont parmi nous aucune valeur, si une dot ne vient à leur appui. » C’est l’éternel refrain de toutes les chansons, le nœud de toutes les comédies, la trame de tous les romans ; on a fait de gros livres sur ce sujet, l’Académie des sciences morales et politiques en a mentionné honorablement quelques-uns ; chacun y perd ses raisonnements et tous les lieux communs du monde n’y feront rien ; nous souffrons du mal social qui envahit les vieux peuples agglomérés dans des villes trop étroites et dévorés par des besoins matériels qui vont augmentant de jour en jour ; c’est la maladie du célibat.

Quel remède à cela ? Un seul : la colonisation de vastes espaces ; or nos possessions d’outre-mer sont nulles, et le Français, le Parisien surtout, est réfractaire à l’émigration. On aurait beau proclamer parmi nous la loi Papia Poppœa, qui frappait à Rome un impôt — æs uxorium — sur les célibataires, on n’obtiendrait pas un mariage de plus. Nos mœurs inclinent de plus en plus vers une sorte de solitude relative, vers la répudiation de ce qu’on peut appeler les devoirs naturels ; la morale, l’économie politique, la religion, font de vains efforts ; à chaque recensement quinquennal, on constate que le nombre des mariages tend à diminuer. On pourrait dire aujourd’hui aux Parisiens ce que, du temps des Gracques, le censeur Metellus disait aux Romains : « Citoyens, si nous pouvions vivre sans femmes, nous nous passerions tous de cet embarras (ea molestia careremus) ; mais, puisque la nature a voulu qu’il fût aussi impossible de s’en passer qu’il est désagréable de vivre avec elles, sachons sacrifier les agréments d’une vie si courte aux intérêts de la république qui doit durer toujours[1]. »

  1. Cinq maisons — véritables administrations — ne s’occupent que de