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pour maintenir le bien-être et la sécurité de sa population ; il est temps de dire comment celle-ci se renouvelle et quelles précautions sont prises afin d’assurer à chacun de ses membres une identité irrécusable. Lorsque l’on veut apprécier d’un seul coup d’œil l’énorme mouvement qui modifie sans cesse les éléments individuels dont se compose cette population, il faut un matin, de dix heures à midi, se rendre dans une de nos paroisses les plus fréquentées, — Saint-Roch, la Madeleine, Saint-Sulpice ; — c’est l’image même de la vie ; près des fonts baptismaux, des vagissements indiquent qu’un nouveau-né vient apporter sa part de travail et demander sa part de soleil ; les orgues retentissantes célèbrent le joyeux épithalame de deux époux que le prêtre bénit au milieu des lumières et des parfums, tandis que les chants redoutables du Dies iræ annoncent qu’une âme, rejetant son enveloppe, s’est élancée vers les régions inconnues où surnage toute espérance. On nait, on se marie, on meurt à toute minute dans cette vaste ville où, pendant que l’homme poursuit le labeur forcé, l’impassible nature ne se soucie que de son œuvre, qui est la propagation de l’espèce et l’élimination des faibles.

Quoique les vieillards ne manquent pas à Paris et qu’on puisse même y découvrir aujourd’hui quelque centenaire qui venait au monde lorsque mourait Louis XV, on peut affirmer que la population parisienne est certainement renouvelée en l’espace de cinquante ans. On sait avec une certitude mathématique dans quelles proportions se produisent les naissances, les mariages et les décès ; mais on ne saura jamais dire d’où sont partis, quelles routes ont parcourues, quel but ont atteint, de quelle manière ont fini ceux dont on a enregistré l’apparition au jour et dont on a constaté la mort. Ce serait là une recherche intéressante entre