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autre, et finit quelquefois par disparaître sous un troisième. Les journaux scientifiques et littéraires sont sujets à de moins brusques variations ; ils ont une clientèle moyenne dont ils étudient les goûts et qu’ils tâchent de satisfaire ; enfin nous ajouterons qu’il n’est recueil périodique, si médiocre, si fastidieux qu’il puisse être, qui ne trouve 300 abonnés ; c’est là un chiffre minimum reconnu par la librairie ; on le constate, mais on ne l’explique pas.

La presse française a traversé des destinées bien diverses, et, plus d’une fois réfugiée, après un naufrage, sur le radeau de la Méduse, elle a pu croire qu’elle allait sombrer. Quel que soit le sort que l’avenir lui réserve, elle ne périra pas. On pourra chercher encore à restreindre son action, à la « museler », comme disent ceux qui la haïssent, elle restera debout, ne serait-ce que pour servir les passions et exprimer les idées de ceux qui la combattent. Dans cette lutte que nous avons déjà vue se renouveler si souvent, les vainqueurs n’ont pas toujours été d’une irréprochable bonne foi. Ils trouvaient tout naturel d’imposer silence à leurs adversaires et de garder pour eux-mêmes le droit de parler. Montagne ou Gironde, celui qui, par habileté ou par hasard, se saisit du pouvoir, fait taire tout le monde autour de lui, afin que l’on n’entende plus que sa voix ; celle-ci lui revient répétée par l’écho ; il l’écoute et croit y reconnaître l’expression de l’opinion publique. Illusion inévitable et dont on meurt.

Voir un gouvernement tolérant et une presse respectueuse marcher côte à côte, se développer parallèlement, s’éclairer par un concours mutuel, s’unir pour détruire les abus et découvrir la vérité, avoir l’un envers l’autre une indulgence intelligente, oublier toute préoccupation personnelle et ne rechercher que le bien de la nation, c’est là un spectacle idéal que tout homme