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Selon les gouvernements auxquels la France a successivement remis le soin de sa destinée, la censure fut plus ou moins tolérante ; pendant la Révolution, elle n’y allait pas de main morte, et les comédiens du Théâtre de la Nation envoyés en prison le 29 août 1793, pour avoir représenté Paméla, de François de Neufchâteau, n’en sortirent qu’au mois de décembre ; quant à l’auteur, il y resta longtemps et ne fut délivré qu’après la journée de thermidor. Pendant l’Empire, elle ne fut pas douce aux petits théâtres, que Napoléon n’aimait guère. D’un trait de plume, par décret du 8 août 1807, il en supprima vingt-deux ; le coup était rude, mais on peut croire qu’il visait surtout l’impératrice Joséphine, qui s’amusait beaucoup aux « bambochades » ; l’empereur ne l’entendait pas ainsi, et le 17 mars de la même année, il lui avait écrit d’Osterode : « Il ne faut pas aller en petite loge aux petits spectacles, cela ne convient point à votre rang. »

La censure peut tenir bon quelque temps contre l’esprit public, mais toujours elle finit par être débordée. Nous avons le récit loyal des efforts qu’elle a faits depuis vingt-cinq ans pour arrêter la littérature dramatique sur la pente où celle-ci a glissé[1] ; ses efforts, aussi vains qu’énergiques, se sont brisés contre l’ensemble même de nos mœurs. On peut dire du théâtre que les peuples ont celui qu’ils méritent. Les observations de la censure, les atténuations imposées par elle ont été

    ainsi que l’ont fait ses prédécesseurs, de refuser sa permission pour toutes pièces ou portions de pièces qui, selon son avis, lui paraîtraient d’après leur ton ou leur tendance n’être pas convenables pour la scène dans ce pays et qu’il s’attend à voir ses décisions à leur sujet strictement observées.

    Je suis, messieurs, votre obéissant serviteur,
    Spencer Ponsonby.

  1. Histoire de la censure théâtrale en France ; la Censure dramatique et le théâtre, 1850, 1870, par Victor Hallays-Dabot.