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naire. Loin d’essayer de nier, il avoua avec une franchise et une humilité très-sincères. Lorsque « sa frénésie », — c’est son mot, — le prenait, il s’échappait de la caserne, sautait d’un bond par-dessus les murs du cimetière ; il savait qu’on avait installé une machine infernale ; il y courait et « la démantibulait d’un coup de pied » ; les chiens s’élançaient vers lui, il marchait contre eux et les chiens se sauvaient. Il parvenait à cette inexplicable puissance surhumaine qui n’est pas très-rare dans certains cas d’affection nervoso-mentale. Sa force dépassait tout ce que l’on peut imaginer : à l’aide de ses seules mains, il enlevait la terre qui recouvrait le cercueil ; brisait celui-ci et déchirait le cadavre, qu’il hachait aussi quelquefois à coups de sabre. Était-ce tout ? Non ; mais il est des atrocités qu’il faut taire. Ce possédé se sauvait ensuite des lieux de repos qu’il avait souillés, puis se couchait n’importe où, — dans un fossé, au bord d’une rivière, sous la neige, sous la pluie, — et pendant deux heures dormait d’un sommeil cataleptique qui lui permettait de percevoir tout ce qui se faisait autour de lui. À la suite de ces accès il se sentait « brisé et comme moulu pendant plusieurs jours ». C’était un monomane emporté par des impulsions irrésistibles et fort probablement atteint d’épilepsie larvée. Il fut condamné à un an d’emprisonnement, maximum de la peine édictée par l’article 360 du Code pénal. Cet homme vit toujours ; il est guéri, et c’est un modèle de bonne conduite.

Ce n’était pas, on le pense bien, aux concessions perpétuelles qu’il s’adressait, car elles sont enveloppées de monuments en pierre qu’il n’aurait pu desceller, malgré la vigueur morbide dont il était animé ; son aberration ne lui ôtait pas toute lucidité d’esprit, et il allait fouir les concessions temporaires ou les inhumations gratuites. Celles-ci, en effet, sont couvertes par