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Voyant que l’autorité civile restait désarmée et que l’Église, à laquelle tous les lieux de sépulture ont appartenu en France jusqu’à la loi du 15 mai 1791, ne voulait pas fermer ce cloaque pestilentiel, le parlement intervint. Par un arrêt du 12 mars 1763, il avait demandé aux paroisses de Paris, aux commissaires et aux officiers du Châtelet des mémoires concernant le nombre des décès et les inconvénients des modes de sépulture en usage. Cette question fort délicate, qui touchait à des habitudes invétérées et à des sentiments religieux très-respectables, fut approfondie avec soin, et le parlement rendit le célèbre arrêt du 25 mai 1765. « La cour ordonne : 1° qu’aucunes inhumations ne seront plus faites à l’avenir dans les cimetières actuellement existants dans cette ville, sous aucun prétexte que ce puisse être ;… 3° qu’aucunes sépultures ne seront faites à l’avenir ou accordées dans les églises ;… 4° qu’il sera fait choix de sept à huit terrains différents, propres à recevoir et consommer les corps et situés hors de la ville[1]… » L’arrêt portait que toutes ces prescriptions étaient exécutoires à compter du 1er janvier 1766. C’était net et clair ; s’empressa-t-on d’obéir ? Nullement ; les sépultures dans les églises ne furent point interrompues, et l’on continua à « fossoyer » aux Innocents comme par le passé.

Au commencement de 1780, le cimetière durait toujours, et peut-être durerait-il encore, si un accident n’était venu épouvanter tout le monde et convaincre les plus récalcitrants. La terre, bourrée de corps sur une profondeur de 26 pieds, ne les contenait plus ; elle avait beau se soulever, chercher des points d’appui

    avoir été un peu moins crédule ; Théodore Zvinger, dans son livre Methodus apodemica (Basle, 1577), dit qu’il faut neuf jours pour qu’un corps soit dévoré aux Innocents.

  1. Voir Pièces justificatives, 5.