Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/47

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pendant la période des étrennes. Dès la fin de novembre, les emprunteurs affluent, ils apportent tout objet représentant une valeur quelconque et qui n’est pas pour eux de nécessité rigoureuse ; avec l’argent qu’ils en retirent, ils achètent les matières premières, confectionnent ces mille articles connus sous le nom générique de bibelots, et les débitent avec avantage dans les baraques qu’ils sont autorisés à occuper sur la voie publique. Aussitôt que la vente est terminée, dès la première quinzaine de janvier, les dégagements sont opérés avec une régularité remarquable.

Les fabricants en chambre, les modestes boutiquiers, les patrons qui n’occupent que deux ou trois ouvriers, courent au Mont-de-Piété lorsque arrive l’échéance d’un billet à ordre souscrit par eux, lorsqu’il faut renouveler la patente, lorsque l’époque du terme approche, enfin lorsqu’ils ont intérêt à faire des achats au comptant. Qu’engagent-ils ? Leur montre, leurs couverts, leurs médiocres bijoux ? Rarement ; ils engagent plus volontiers le produit de leur travail, et c’est là ce qui explique la quantité relativement considérable de marchandises neuves, — un sixième environ, — que renferment les magasins du Mont-de-Piété. Plusieurs d’entre eux engagent des objets qui leur ont été remis par un client afin de pouvoir achever un travail commandé par un autre. Je prendrai un exemple : Une couturière reçoit un coupon d’étoffe pour faire une robe ; elle est sur le point de terminer un autre vêtement dont elle doit fournir la garniture ; elle n’a pas d’argent ; elle engage le coupon intact au Mont-de-Piété. Avec le prêt, elle achète les boutons, les franges qui lui manquent, elle livre le costume et touche le prix, qui lui sert immédiatement à dégager l’étoffe qu’on lui a confiée. — Et si on ne la paye pas ? — Elle en est quitte pour déposer sa montre jusqu’au moment où sa facture lui sera soldée.