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ressentais en voyant ce miracle accompli ; il me répondit : « Ces gens-là sont bien heureux d’avoir nos terres pour y jeter leurs eaux sales ; sans nous, ils ne sauraient qu’en faire, et ils ne nous payent rien pour cela ; ne faudrait-il pas les remercier encore ? »

Ces grands et féconds travaux n’ont été qu’un essai ; l’irrigation et le colmatage des terres stériles ont été faits dans une mesure restreinte ; on va étendre le champ de l’action et procéder bientôt avec une ampleur extraordinaire. Actuellement, le collecteur de la rive droite produit un cube moyen de 218 664 mètres ; or la pompe aspirante et foulante qui prend l’eau et la pousse vers les réservoirs d’engrais ne monte que 160 litres par seconde, ce qui équivaut à 13 824 mètres en vingt-quatre heures ; le reste coule en Seine. Cette masse énorme de produits fertilisants va être utilisée, ce fleuve sera capté à son embouchure : — de nouvelles machines, fortes de 150 chevaux, viennent d’être installées à cet effet ; — on lui fera traverser la Seine dans de larges conduites de fonte, qui déjà sont couchées sur l’herbe comme d’immenses canons tombés de leur affût. Des réservoirs appropriés seront construits et deux canaux traverseront la plaine en répandant la fécondité au passage. Ils représentent un angle très-ouvert, dont le sommet est placé sur les terrains actuellement exploités. Un de ces canaux doit aboutir près de la Seine, à peu près en face de l’extrémité aval de l’île Saint-Denis ; l’autre, laissant Gennevilliers à droite, s’avance parallèlement à la route de Paris à Argenteuil, fait brusquement un coude vers le sud et longe les rives de la Seine, qu’il aborde à la tête de l’île Marante. De cette façon, la plaine entière pourra être facilement irriguée : elle ne contient pas moins de 2 000 hectares de terrains sablonneux, qui en deux ou trois ans seront devenus le plus beau jardin maraîcher que l’on puisse voir — à la porte