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lument exceptionnelles pour que l’on eût à redouter des accidents pareils ; on a chassé « les basilics » qui savaient si bien, sous Louis XIII, tuer les ouvriers d’un coup d’œil. Les engorgements, les amoncellements de détritus semblables à ceux qu’a supportés l’égout Amelot ne sont plus à craindre ; les pentes, ménagées avec soin et scientifiquement déterminées, une surveillance active, la masse d’eau entraînée chaque jour, remédient d’avance à ces inconvénients. Les grilles qui jadis protégeaient l’ouverture des chutes au milieu des rues ont été jetées au tas des vieilles ferrailles ; elles sont remplacées par des bouches d’égout dissimulées sous la margelle du trottoir. On ne les a pas ménagées : au 31 décembre 1872, Paris en comptait 6 764 ; elles suffisent même dans les orages les plus violents à recevoir le trop-plein de nos rues, de nos places, de nos quais et de nos boulevards.

C’est devenu une sorte de partie de plaisir de visiter les égouts ; tous les mois on y fait une promenade publique, et les billets distribués par l’administration sont fort recherchés. Le trajet n’est pas bien long, mais il suffit pour amuser les curieux, que l’on mène d’abord en wagon et ensuite en bateau. Le voyage est limité ; il commence place du Châtelet et finit à la place de la Madeleine. Dés que l’on a descendu l’escalier de fonte en vrille et que l’on a pénétré dans la vaste chambre, le Paris souterrain se dévoile ; il livre son secret d’un seul coup. Ces énormes conduites métalliques, brillantes et polies comme un marbre noir, qui s’appuient sur de fortes béquilles de fer, portent les eaux de l’Ourcq, de la Seine, et attendent celles de la Vanne ; elles poussent sous chaque trottoir du pont au Change deux tuyaux qui partent d’un tronc commun et ressemblent aux jambes d’un géant nègre couché sur le dos ; plus loin les conduites moins amples, et par conséquent moins pesantes, peuvent être « agrafées » aux parois de la muraille,