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directement de la Bastille après avoir drainé tous les quartiers traversés ; place de la Madeleine, il absorbe le grand égout des Petits-Champs[1], et sur le boulevard Malesherbes, à l’angle de la rue de la Pépinière, il est rejoint par un canal qu’on nomme le collecteur des coteaux, qui, venant du cours de Vincennes et parcourant la rue de Charenton, a repris exactement le tracé de l’ancien ruisseau de Ménilmontant, et accepte au passage les détritus des pays sillonnés par les boulevards de la Chapelle, Rochechouart et Clichy.

La rive gauche n’a qu’un seul collecteur ; à sa source il capte une rivière tout entière, la Bièvre, qui auparavant allait se jeter, au-dessus du pont d’Austerlitz, dans la Seine qu’elle empoisonnait. Ce ruisseau fangeux, entre les rives amollies duquel coulait un liquide multicolore et nauséabond, a enfin reçu la seule destination qu’il méritait : il est devenu un égout ; la galerie qui le saisit rue Geoffroy-Saint-Hilaire, derrière le Jardin des Plantes, se dirige vers le boulevard Saint-Michel, y fait un coude et longe les quais jusqu’au pont de l’Alma ; là un double siphon métallique plongeant dans la Seine aspire tout le tribut du faubourg Saint-Marceau, du quartier latin, du faubourg Saint-Germain, le porte de l’autre côté de la rivière et le déverse dans une galerie qui, prenant route sous les hauteurs de Chaillot, évite

  1. Cet égout à une extrême importance. Il part de la place des Victoires, suit la rue des Petits-Champs, la rue et le boulevard des Capucines. C’est une sorte de collecteur, car il dégage l’égout Richelieu, qui, avant ces diverses constructions, était singulièrement dangereux : à la moindre pluie, il s’engorgeait. Peu de temps avant l’ouverture des travaux de l’égout des Petits-Champs, six ouvriers y furent surpris par un orage ; l’eau monta avec une rapidité extraordinaire. Les six malheureux se prirent par la main et marchèrent contre le courant qui les baignait au visage ; cinq purent atteindre une galerie plus élevée ; le sixième, battu par le flot, lâcha prise ; le lendemain, son cadavre fut retrouvé en Seine, où l’égout l’avait porté. C’est pour éviter de tels accidents qu’on a tracé la galerie qui dessert la vallée creusée entre la butte des Moulins et la levée des boulevards.