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et venaient se ranger à côté des cornues qui les attendaient. Ah ! si les Parisiens du temps de Louis XIV, qui bénissaient La Reynie quand le sonneur passait le soir dans les rues pour donner le signal de l’allumage des chandelles, pouvaient, subitement ressuscités, voir quels miracles on accomplit sans peine aujourd’hui pour avoir un éclairage suffisant, ils croiraient volontiers que cela n’est qu’œuvre du démon. Jadis on a brûlé des gens pour moins que cela.

Au bout de quatre heures, on retire le tampon de la cornue ; l’opération première est terminée, la distillation est complète. Le charbon de terre s’est débarrassé du gaz qu’il contenait et il est devenu du coke ; il est d’un rose vif pailleté d’escarboucles. À l’aide d’un crochet de fer, les déluteurs le retirent de la cornue ; il tombe sur le sol couvert de poussière, n’y brille pas longtemps, et au contact de l’air froid prend promptement une teinte neutre et noirâtre. À coups de pelle on le recueille, on le jette dans des chariots en tôle, et l’on va le verser dans la cour, où il est rapidement éteint sous l’eau dont on l’asperge. Amoncelé dans les chantiers à coke, il chauffera les batteries à gaz, s’en ira alimenter la cuisine des restaurants, brûlera dans les cheminées économiques et dans les poêles manomètres qui enlaidissent l’atelier des peintres.

La consommation de la houille est énorme : l’usine de La Villette, pendant l’hiver, lorsque la nuit est longue, en absorbe environ 720 000 kilogrammes par jour ; en été, 330 000 kilogrammes suffisent. Pendant l’année 1872, la Compagnie parisienne en a brûlé pour la somme de 12 362 000 francs. Les houilles que l’on emploie sont de diverses provenances, on les mêle approximativement dans des proportions que l’expérience a indiquées ; on a calculé que 1 000 kilogrammes de charbon produisent 520 kilogrammes de coke et une