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rées par les mousses : ce sont les bornes de repère qui jadis indiquaient le trajet des conduites souterraines dans les champs et à travers les rues de Paris jusqu’au grand réservoir de la Vieille-Estrapade ; on les a arrachées il y a une trentaine d’années et depuis cette époque elles gisent sans utilité à l’abri du grand aqueduc dont elles furent jadis les sentinelles avancées. Toujours marchant au milieu de plates-bandes cernées de buis, on arrive à la porte du regard n° 13, qui est situé à 7 163 mètres 90 centimètres du point de captation ; on ouvre la porte et l’on se trouve dans une chambre pleine de rumeurs ; l’eau y bruit avec des glouglous retentissants. Un large tuyau en fonte rampe au-dessus d’un petit canal taillé dans la pierre et escorté de deux trottoirs ; une longue galerie voûtée, striée par des jours blanchâtres et blafards projetés à travers des ouvertures étroites comme des meurtrières, s’enfonce dans la nuit et semble se briser tout à coup à un angle éloigné. C’est comme un immense cloître abandonné auquel il ne manque que le silence.

Je l’ai visité le 15 mars 1873 et jamais peut-être il n’avait été en telle effervescence. Les pluies tombées en abondance avaient grossi les rivières, gonflé les sources, pénétré le sol, et l’eau ruisselait violemment à travers l’aqueduc ; la conduite métallique d’un diamètre de 30 centimètres, insuffisante à contenir l’eau qui s’y voulait précipiter, laissait échapper dans le canal qu’elle surmonte tout ce qu’elle ne pouvait accepter. Celui-ci roulait une eau rapidement entraînée par la pente, mais qui, malgré le courant, déposait en hâte tous les calcaires qui la chargent et se faisait ainsi un lit épais de carbonate de chaux. Ce canal servait donc de déversoir au trop-plein qui était considérable, puisque la moyenne du rendement des sources du Sud est de 1 200 litres par minute et qu’il était alors de 6 000. De mémoire