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sources du Nord, c’est-à-dire celles qui s’écoulent à Belleville et aux Prés-Saint-Gervais. En réalité, ce ne sont point des sources : c’est de l’eau recueillie goutte à goutte au milieu des terrains qu’elle traverse. Les moines de Saint-Laurent et de Saint-Martin avaient remarqué que la pluie tombée sur les coteaux ne descendait pas tout entière dans les vallées ; ils en conclurent que la terre en absorbait une bonne partie qui, pénétrant les couches successives, se perdait à des profondeurs où elle disparaissait à toujours. Ils résolurent de réunir ces suintements partiels, de prendre la source, pour ainsi dire, en formation et de l’arrêter au passage avant qu’elle ait été rejoindre les nappes souterraines que nul alors ne savait atteindre. Sur les hauteurs septentrionales de Belleville et des Prés-Saint-Gervais, ils construisirent ce que l’on appelle des pierrées, sorte de conduites carrées pour la plupart, bâties en moellons mal reliés, ouvertes çà et là par des fissures intentionnellement ménagées et appelées barbacanes, qui permettent à l’eau de filtrer à travers les parois, pour glisser jusqu’à un petit canal dont le lit est ordinairement en terre glaise, — en imperméable, comme disent les gens du métier. C’est là tout le système de captation, qui est fort simple, mais qui aussi est très-défectueux. Ces sources factices, n’étant alimentées que par l’humidité du sol, sont, bien plus que les sources naturelles, sujettes à des variations extraordinaires ; avec elles, on ne sait jamais sur quoi compter : s’il a plu, la terre saturée jette une grande quantité d’eau dans la pierrée ; si le ciel est pur, si le vent du nord-est emporte les nuages et brûle les terrains, le réservoir est à sec ou peu s’en faut. Par les hivers humides, pendant les mois de mars pluvieux, la jauge des Prés-Saint-Gervais est de 250 litres par minute ; en été, elle dépasse rarement 90, et parfois, dans les jours de grande