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mité. — Le point de vue. — Les amaurotiques. — Expérience. — Ceux qui ont vu. — Les boxes. — Ils se tassent. — L’attitude. — Tic nerveux. — Le réfectoire. — Prudence féline. — La récréation. — Jeux violents. — Les batailles. — Agitation musculaire. — Le bruit est la lumière de l’aveugle. — Confusion. — Finesse de l’ouïe. — Quel joli son ! — Pudibonderie. — La vue est le toucher à distance. — Salle de bains. — Propreté. — Ordre. — Orgueil. — Entêtement. — Température. — Le tact. — Toucher général. — L’aérographie

L’Institution est absolument isolée ; elle est sertie dans un cadre formé par le boulevard des Invalides, la rue de Sèvres, la rue Duroc et la rue Masseran. L’école des jeunes aveugles a été plus favorisée que la maison des sourds-muets, car au milieu de la cour d’entrée s’élève la statue de Valentin Haüy regardant François Lesueur, qui épelle le nom du bienfaiteur. Un bâtiment destiné aux services généraux sépare l’établissement en deux parties égales ; celle de droite est attribuée aux garçons, celle de gauche est réservée aux filles. Une longue galerie, qui a quelque chose de claustral et qui par hasard n’est pas peinte en jaune, donne accès aux quartiers des élèves. Dès qu’on a franchi la porte de l’école proprement dite, il suffit de regarder le grand escalier pour reconnaître qu’on est chez des aveugles. En effet, les degrés ne sont pas, comme d’habitude, usés dans la partie moyenne : ils sont fatigués, amincis aux extrémités ; on comprend que ceux qui les gravissent cherchent un point d’appui, un guide-main vers la rampe et vers la muraille.

Lorsqu’on arrive pour la première fois aux heures de certaines études, on subit une impression assez étrange : on se croit dans une vaste boîte à musique ; de tous les coins sortent des bruits d’orgues, de pianos, de clarinettes, de violons, de contre-basses, de cornets à pistons, de flûtes et d’ophicléides. C’est le palais de la cacophonie, car chacun y travaille pour son compte, apprend son morceau, manie son instrument et perfectionne sa propre instruction sans se préoccuper des au-