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d’un intérêt des plus modiques, si on le compare à celui que les Lombards particuliers lui avaient imposé. En outre, la justice semble prendre le Mont-de-Piété sous sa protection, car l’excessive rigueur des lois criminelles redouble, lorsqu’il s’agit de punir le malfaiteur qui engage des objets volés[1]. Pourtant, dès la fin de 1789, l’établissement périclite, son crédit s’affaisse, les demandes qui l’assaillent ne sont plus en rapport avec ses ressources, et, comme tant d’autres institutions excellentes qu’il a fallu réédifier depuis, il va sombrer dans la tourmente où la société française faillit périr.

La création du papier-monnaie n’était point faite pour le relever ; de plus, il est atteint par les mesures inquisitoriales qui marquent l’esprit soupçonneux de l’époque, et un arrêté de février 1793 prescrit d’y faire le relevé de tout ce qui appartient aux émigrés. Le 20 nivôse de l’an II, la constitution du Mont-de-Piété est modifiée profondément par un arrêté du département ; à l’avenir, il sera sous la direction de six administrateurs indépendants les uns des autres. Le résultat d’une telle organisation ne se fait pas attendre ; les nouveaux titulaires se dénoncent les uns les autres, et l’on s’inquiète surtout de savoir où l’on placera le buste de Marat dans la cour de l’établissement. En matière de finances, la cacophonie est à son comble. Une loi du 11 avril 1793 déclare que l’argent est une marchandise comme une autre ; dès lors, la valeur conventionnelle qui lui est attribuée disparaît ; quel que soit le taux d’intérêt exigé, il n’y a plus d’usure. Cette loi ne vit pas longtemps, elle est rapportée le 6 floréal an II, mais elle est rétablie par une loi du 8 thermidor an IV. En présence de ces contradictions économiques, de l’affluence immodérée des assignats, le Mont-de-Piété n’avait plus de raison d’être, et l’on peut dire qu’il

  1. Voir Pièces justificatives, 1.