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d’autant plus promptement qu’ils sont plus jeunes, et, il faut bien le dire, plus ils sont jeunes, plus ils sont précieux, car on s’attendrit à les voir et on leur fait volontiers l’aumône. Quand les enfants sont arrêtés, les patrons crient à l’injustice : empêcher tel enfant qu’ils louent 100 ou 120 francs par année de mendier à leur profit, c’est leur causer un préjudice grave. Ils se contentent maintenant d’échanger leurs doléances, car ils savent qu’il n’est point prudent d’aller en fatiguer certaines oreilles. Les arrestations sont nombreuses et, on peut l’avouer, ne produisent que de bien médiocres résultats. En 1867, pendant l’année de l’Exposition universelle, à ce moment où toutes les gloires et tous les vices du monde semblaient s’être donné rendez-vous à Paris, on a mis la main sur 1 544 petits mendiants italiens. C’est anormal et la proportion varie entre 400 et 700 ; en 1868, 698 ; en 1869, 431. Est-ce à dire que ce genre de mendicité à une tendance à diminuer à Paris ? Non pas ; de guerre lasse sans doute, on y fait moins attention. On tourne dans un cercle vicieux qui énerve et désarme l’administration.

Voilà une espèce qui se reproduit constamment. Une bande de cinq individus, revenant de province, arrive à Paris et est abandonnée par son cornac à la gare même du chemin de fer. Dénués et sans logement, les cinq virtuoses vont coucher dans une maison en construction, ils y sont surpris et conduits chez le commissaire de police ; interrogés, ils reconnaissent n’avoir pas un sou vaillant et demandent à manger. On les interne au Dépôt et on les remet ensuite au consul d’Italie, qui les fait escorter jusqu’au pays natal, d’où ils reviennent quinze jours après avec des papiers parfaitement en règle et sous la conduite d’un nouvel exploiteur qui se donne pour leur oncle ou leur proche parent. On peut les renvoyer cinquante fois, cinquante fois ils revien-