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Salpêtrière, devrait une fois pour toutes racheter ces quêtes et y mettre fin.

Ce n’est pas tout. Les quêtes publiques, les congrégations officielles, n’ont point suffi à l’ardeur des pensionnaires de la Salpêtrière, ou de ceux qui les dirigent. Il existe parmi elles une société religieuse secrète dont les membres sont nommés les zélatrices. Il y en a environ 1 500, qui donnent quinze centimes par mois ; d’autres, moins dénuées ou plus excitables, versent cinq francs et même dix francs chaque mois. Cet argent est employé à faire dire des messes et à acheter des livres de piété qui sont ensuite revendus aux initiées. Parmi ces livres, qui presque tous ne sont que des opuscules sans valeur, nous citerons le Manuel du Rosaire vivant, les Annales de la Propagation de la foi, les Annales de la Sainte-Enfance. On fait des lectures pieuses aux malades. Le secret de l’association est bien gardé ; le but mystérieux qu’elle poursuit n’a pas encore été nettement défini, et lorsqu’on interroge une des zélatrices, elle se renferme dans un mutisme absolu. Les pensionnaires sont fort agitées par toutes les ambitions que réveille en elles le désir d’appartenir à ces différentes catégories religieuses. Au lieu d’employer leur argent à payer leur café au lait ou à acheter quelque bon fichu de tricot pour l’hiver, elles le consacrent à des œuvres inutiles et troublantes. Sous ce rapport, la Salpêtrière offre un exemple qui renverse toutes les idées admises : on croit ordinairement que la religion doit donner de l’argent à la misère ; là, c’est le contraire qui se produit, et la misère donne son épargne à la religion.

En visitant ce grand établissement, ces vastes cours, cet immense jardin potager, en parcourant le large espace où sont dispersés les bâtiments qui datent de Louis XIV et ceux qu’on a récemment élevés, dont les noms disent les fondateurs, tels que Mazarin, Lassay,