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En 1286, Jean de Pontoise, évêque de Winchester[1], acheta du chapitre de Notre-Dame une grande métairie qu’on appelait alors la Grange aux queux (cuisiniers), et y fit bâtir une maison de plaisance qui fut le manoir de Gentilly. Acquis par Amédée V de Savoie, le domaine, par suite d’arrangements particuliers, devint la propriété de Jean d’Orléans, duc de Berry, qui, reprenant les constructions à demi ruinées, y éleva un château magnifique dont le donjon dominait Paris. Pendant la querelle des Armagnacs et des Bourguignons, ceux-ci s’emparèrent du manoir, y mirent le feu et le détruisirent en partie. Tel qu’il était en 1416, le duc de Berry le légua à son premier possesseur, au chapitre de Notre-Dame, en échange de quelques prières et de deux processions.

Nul n’entretint plus le vieux château, qui se transforma en une véritable caverne de voleurs ; ce repaire de brigands était assez redoutable pour qu’on fût obligé de lui donner assaut et de l’enlever à main armée en 1519. Rentré en 1632 dans les apanages royaux, il fut rasé de fond en comble par Richelieu, qui le fit rebâtir dans la forme que nous lui voyons aujourd’hui, l’érigea en commanderie de Saint-Louis, et le destina à servir d’asile à des officiers devenus invalides par suite de leurs blessures. Un moment, vers 1648, on y déposa les enfants trouvés, ainsi que je l’ai déjà dit, et en 1657 Louis XIV, qui avait déjà formé le projet de bâtir un hôtel spécialement réservé aux invalides, réunit la commanderie, qu’on avait placée sous le vocable de Saint-Jean-Baptiste, au système de l’hôpital général, et la consacra aux pauvres, aux femmes de mauvaise vie, aux fils insoumis, aux vagabonds et

  1. C’est lui qui, sur le point de mourir, disait : « Comment est-il donc possible que je meure, étant si riche ! Quoi ! l’argent ne peut donc rien à cela ? »