Page:Du Camp - Paris, tome 4.djvu/139

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

miner qu’à cheval ou à pied, où les mœurs primitives des peuples nomades subsistaient encore, où les pèlerinages étaient incessants, le cubiculum hospitale, la chambre d’hospitalité, existait dans la demeure des personnages riches ; les municipes, les congrégations religieuses, dans un but à la fois charitable et intéressé, pour attirer et retenir les étrangers, firent construire des maisons où les pèlerins, les voyageurs, trouvaient le gîte et parfois même la nourriture. Ceux qui étaient arrêtés par la fatigue, la misère, la souffrance, par un accident quelconque, y prolongeaient leur séjour. Il est probable que pendant une de ces famines, une de ces épidémies si fréquentes au moyen âge[1], le caractère de l’institution se modifia ; les hôtes firent place aux malades, et plus d’une maison d’hospitalité devint une maladrerie avec le double caractère d’hospice et d’hôpital. Ce dernier mot a subsisté, quoiqu’il ait aujourd’hui singulièrement dévié de son acception première. Il est à peu près certain que l’hôpital parisien par excellence, l’Hôtel-Dieu traversa ces différentes phases. Ce fut d’abord au septième siècle un couvent de femmes sous l’invocation de saint Christophe. On sait qu’en 829 c’était déjà un refuge hospitalier où les chanoines de Notre-Dame allaient à Pâques laver les pieds des pauvres. Le moment précis où l’Hôtel-Dieu cessa d’être une hôtellerie analogue aux caravanséraïs d’Orient ne peut être parfaitement précisé ; mais ce doit être vers le milieu ou vers la fin du douzième siècle qu’il fut exclusive-

  1. « Sur soixante-treize ans, il y en eut quarante-huit de famines et d’épidémies. En 987, grande famine et épidémie ; en 989, grande famine ; en 990-991, famine et mal des ardens ; en 1001, grande famine ; en 1001-1008, famine et mortalité ; en 1010-1014, famine et mal des ardens ; en 1027-1029, famine (anthropophagie) ; en 1031-1033, famine atroce ; en 1035, famine, épidémie ; en 1045-1046, famine en France et en Allemagne ; en 1053-1058, famine et mortalité pendant cinq ans ; en 1059, famine de sept ans, mortalité. » (Michelet, Histoire de France, 2e édit., t. II, p, 135-136.