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Ainsi, le XIIIe arrondissement (la Glacière, la Butte-aux-Cailles) possède quatre maisons, et le IXe (l’ancien Opéra) n’en a qu’une, qui suffit amplement aux besoins de cette zone dont la richesse parvient facilement à neutraliser l’indigence.

Un drapeau et une inscription explicative les distinguent. Sans être construites sur un modèle identique, elles ont entre elles de tels points de ressemblance, qu’après en avoir visité une on les connaît toutes. Elles sont dirigées par ces femmes admirables qu’on rencontre au chevet des malades, auprès du berceau des orphelins, dont les mains délicates pansent les plaies et qui semblent un dictame vivant pour toutes les infortunes ; le peuple, qui de longue date les connaît et les aime, les appelle les Petites-Sœurs des pauvres, les Sœurs-Grises, les Sœurs-du-Pot, les Bonnes-Sœurs ; elles appartiennent à la congrégation des lazaristes que fonda saint Vincent de Paul, et leur vrai nom est Filles de Charité[1]. Elles sont là dans un milieu que l’on dirait créé pour elles, près des pauvres qui les sollicitent, à côté d’une richesse relative qui leur permet de les aider.

  1. Je prie le lecteur de m’excuser si je mets sous ses yeux l’ordure suivante ; mais il est bon de rappeler comment les hommes de la Commune apprécièrent les services rendus à la population par les Sœurs de Charité. Voici, à ce sujet, ce que le Père Duchêne disait dans son numéro du 1er  prairial an 79 : « Ah ! les gueuses ! qu’est-ce qui aurait dit ça ? avec leurs airs de sainte Nitouche ! c’est mauvais comme la gale ! et ça veut gagner le ciel comme ça ? est-ce que dans le Paradis, où les calotins prétendent qu’on ne reçoit que des honnêtes gens, il peut y avoir place pour des bougresses semblables ? Non, foutre ! ou le Père Duchêne n’est qu’un jean-foutre, et nom de Dieu, ça n’est pas vrai ! Savez-vous ce qu’elles font, ces gueuses-là, patriotes ? le Père Duchêne va vous le dire : eh bien, toutes ces chattemites, qui ne font rien pour la nation et qui s’amusent à prier le ci-devant Dieu entre leurs repas, au lieu de travailler, ces chattemites ont toutes été collées par les jean-foutres des anciens régimes dans les hôpitaux où les citoyens qui n’ont pas de quoi sont forcés d’aller faire le saint après s’être toute leur vie esquintés pour nourrir les fainéants. Et dans ces sacrés hôpitaux dont le Père Duchêne, qui connait ça, va un de ces jours dénoncer la foutue organisation — elles font tout ce qu’elles veulent et n’en prennent qu’à leur aise. » (Numéro du 20 mai 1871.)