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les entraîne vers le soleil et vers la liberté ! Ils reprennent la clef des champs, triste clef pour eux, car elle leur ouvre la porte des postes de police et quelquefois celle des tribunaux correctionnels.

Beaucoup d’enfants involontairement égarés sont arrêtés pour leur propre sécurité. J’en ai vu un, un pauvre bambin, qui avait été trouvé à onze heures du soir sur le boulevard Haussmann ; lorsqu’il entra chez le chef de service qui allait l’interroger pour découvrir sa famille, il déclara tout net qu’il ne voulait pas qu’on lui coupât la tête. Le gendarme qui l’accompagnait, un colosse de six pieds, se faisait tout petit et le rassurait en lui disant : On ne te la coupera pas, la tête, puisque l’on n’a pas donné l’ordre. » Un tel argument ne rassurait guère l’enfant, qui pleurait à chaudes larmes. Il est superflu de dire que dans ces cas-là on se hâte de prévenir la famille et de lui remettre « le jeune vagabond », qu’une partie de billes ou de ballon a conduit trop loin du domicile paternel.

Dans cette douloureuse statistique des plaies morales de Paris, vient ensuite le vol, qui est représenté par 8 698 individus arrêtés ; puis l’escroquerie, 1 212 ; l’abus de confiance, 604 ; les outrages à la pudeur, les attentats aux mœurs, l’excitation des mineurs à la débauche, qui forment ensemble un total de 532 ; les ruptures de ban, 729 ; je ne parle ni des voies de fait, ni de la rébellion, qui le plus souvent sont le résultat d’un instant de colère. Les deux crimes les plus difficiles à constater, l’avortement et l’infanticide, donnent des chiffres insignifiants, 10 et 17 ; il en est de même de l’empoisonnement, qui n’a amené que 7 arrestations.

C’est à Paris même, dans l’enceinte des fortifications, que la police trouve ce vilain gibier : 31 894 individus contre 3 857 seulement saisis dans les communes voisines. Beaucoup d’entre eux, 19 671, n’étaient point de