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relations sont différentes, ainsi que cela peut être observé sur les diverses classes de la société lorsqu’on les compare les unes aux autres. Jadis les voleurs de toute sorte recherchaient le centre de Paris ; ils trouvaient là des réduits obscurs, des abris certains, des maisons à triple sortie, des plaisirs faciles et leur grande alliée, la prostitution. C’était dans les rues tortueuses de la Cité, dans ce chapelet de ruelles infectes et mal fréquentées qui s’embrouillaient entre le Palais Royal et le Louvre, dans les bas quartiers du Temple qu’ils avaient établi leurs refuges. Il n’était pas toujours prudent de pénétrer dans leurs bouges, et plus d’une fois les patrouilles grises en furent chassées à coups de bouteilles, de brocs et de tabourets. Tout malfaiteur inquiété se sauvait dans les tapis-francs de la rue aux Fèves, de la rue Haute-des-Ursins, de l’impasse Saint-Martial, sentiers boueux et empoisonnés noués autour de Notre-Dame ; dans le café de l’Épi-scié, situé boulevard du Temple ; à l’estaminet des Quatre-Billards, rue de Bondy ; au cabaret des Philosophes, dit aussi le cabaret de l’Homme buté (assassiné), rue Croix-des-Petits-Champs ; à l’hôtel d’Angleterre, rue de Chartres ; dans les débits interlopes de la rue Froidmanteau et de la rue du Chantre, dans les repoussants garnis de la place aux Veaux, de la rue de la Vieille-Lanterne et de la Petite Pologne.

Rien de tout cela n’existe plus aujourd’hui ; ces repaires ont disparu, emportant peut-être avec eux les regrets des amateurs de pittoresque à tout prix, mais laissant heureusement à leur place des squares, des voies spacieuses, des boulevards immenses. En éventrant ces vieux pâtés de maisons, où la vermine disputait le logis aux voleurs, en démêlant à coups de pioche ces écheveaux de ruelles malsaines, en y faisant violemment entrer l’air et le soleil, on n’a pas seulement ap-