Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/414

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

NUMÉRO 8


Rapport fait par M. Crémieux, au nom de la commission chargée d’examiner la proposition de MM. Steenackers, Nogent-Saint-Laurens et le comte Le Hon, ayant pour objet de modifier l’article 26 du Code pénal.


Messieurs,

Faut-il substituer à l’exécution publique des condamnations capitales l’exécution dans un lieu clos et interdit au public ?

Telle est la grave question que soulève la proposition de nos honorables collègues, MM. Steenackers, Nogent-Saint-Laurens et M. le comte Léopold Le Hon.

Après de longues délibérations, votre commission, à l’unanimité, adopte l’affirmative ; un de nos honorables collègues serait d’avis néanmoins que l’exécution non publique, qu’il admet en principe, fût seulement facultative, la cour pouvant, selon les circonstances, ordonner la publicité dans l’application de la peine[1].

La commission me charge de soumettre à la sagesse de la Chambre les motifs qui ont déterminé son opinion.

Ce n’est pas sans un mûr examen que l’on peut statuer sur un changement aussi radical dans une des dispositions les plus anciennes et les plus importantes de notre loi criminelle, sur un point si grave de cette législation.

Dans l’ancien droit, l’exécution de la peine capitale avait toujours lieu sur une place publique. Le roi seul avait le droit de substituer à l’exécution publique l’exécution dans l’intérieur de la prison. L’histoire nous montre, à trente années de distance, le maréchal de Birou condamné, par arrêt du parlement de Paris, à être décapité en place de Grève, et Henri IV ordonnant l’exécution dans la cour de la Bastille ; le duc de Montmorency, condamné, par arrêt du parlement de Toulouse, à subir le dernier supplice en place publique, et Louis XIII ordonnant l’exécution dans l’intérieur de la prison.

Nos lois pénales, depuis la révolution de 1789, ont toutes maintenu la publicité de l’exécution.

Le code de 1791 voulait que l’exécution eût lieu sur la place publique de la ville où le jury d’accusation avait été convoqué.

Le code de l’an IV voulait que le supplice fût subi sur l’une des

  1. Un de nos honorables collègues, M. Gambetta, partisan de l’abolition de la peine de mort, se refuse à voter pour le projet ; il le repousse comme une mesure qui peut éloigner l’abolition de l’échafaud.