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souvent, été engendrées que par des misères physiques ? La mère supérieure, qui est d’une intelligence remarquable et d’une douceur charmante, s’épuise en vains efforts pour augmenter son petit troupeau ; hélas ! ce ne sont point les brebis égarées qui manquent ; c’est la bergerie même qui les repousse, car elle est pleine, elle est comble, et elle ne peut que trop rarement ouvrir la porte au fur et à mesure des vacances qui se produisent[1].

Les deux œuvres dont je viens de parler, Dames diaconesses et ouvroir de la Miséricorde, prennent indifféremment les enfants en correction, les voleuses, les vagabondes et les filles ; une œuvre s’est spécialement consacrée à ces dernières : c’est le Bon-Pasteur, dont le siège est rue d’Enfer, derrière les lourdes constructions de l’Observatoire. C’est en 1819 que l’ancienne fondation de madame de Combé fut reprise à nouveau et établie avec le vieil esprit mystique de renoncement absolu, de pénitence perpétuelle, en vertu duquel on arrache une âme à Satan pour la donner à Dieu. On semble aujourd’hui vouloir se départir un peu de ce système trop exclusif, et patronner quelquefois des pensionnaires à l’extérieur ; mais le but poursuivi étant de soustraire pour toujours ces malheureuses au vice, on les garde autant que l’on peut. On n’accepte ni femme mariée, ni jugée, ni épileptique, ni fille ayant des enfants ; toute attache avec la vie laïque doit être brisée ; on est au repentir, au travail et à Dieu ; le monde est mort.

La règle est austère sans sévérité excessive, et les infractions à la discipline sont si rares, qu’il se passe plusieurs années sans qu’on en ait une seule à réprimer. Comme à l’ouvroir de la Miséricorde, la maison est

  1. Le chiffre des jeunes filles patronnées monterait à sept cents, si cette maison hospitalière était assez grande et assez riche pour les recevoir. (Rapport fait à la commission d’enquête sur le régime des établissements pénitentiaires, par M. Louis Lacaze, membre de l’Assemblée nationale, p. 4.)