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qu’elles ne soient adressées à ses juges, au préfet de police, au chef de service, sont lues avant d’être expédiées ; celles qu’il reçoit sont lues avant de lui être remises. Aussi le greffier chargé de cette pénible mission est-il fort occupé au moment des deux distributions réglementaires que la poste fait chaque jour dans les prisons.

Les punitions sont rares et fort douces ; nul, si ce n’est le directeur lui-même, après rapport des surveillants, enquête sur les faits reprochés et interrogatoire du détenu, n’a le droit d’en appliquer. Le pouvoir discrétionnaire du directeur n’est pas excessif. Toute punition qui dépasse cinq jours de cachot ne peut être infligée que par le préfet de police lui-même. Le cachot est simplement une cellule démeublée, qu’au besoin l’on rend obscure en fermant les volets. La nuit, le prisonnier y couche sur une paillasse ; le jour, il n’a que les carreaux nus pour s’asseoir ; il y est privé de travail et au pain sec ; mais il lui est permis de fumer, comme dans sa cellule. Les murs du cachot sont tailladés d’inscriptions, dont quelques-unes, sinistres par leur violence, ne prouvent pas un grand esprit de repentir chez les condamnés ; celle-ci entre autres : « La victime Bresmacher a manqué sa vangance sur son misérable frère, le 7 août 1867. » On a rarement besoin d’avoir recours au cachot, car les infractions au règlement sont peu communes et la rébellion est inconnue. La solitude, le travail obligatoire, matent l’homme le plus récalcitrant, et par une action lente, mais continue, désagrègent les plus violents instincts de résistance. Aussi, en 1868, on n’a prononcé à Mazas que 427 punitions, et cependant le mouvement général avait été de 10 159 entrées et de 10 158 sorties, qui ont représenté 387 977 jours de détention. À la fin du mois de décembre, la prison contenait 1 110 détenus, qui forment du reste le chiffre de la population moyenne de Mazas.