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serait le reflet et l’indice d’une âme absolument pervertie. Il n’en est rien : la plupart des faces sont, à l’état de repos, vulgaires et sans expression, quelques-unes sont fort douces et plusieurs agréables. La plupart de ces tristes personnages ont l’air méprisable et commun ; mais quelques-uns ont une distinction native ou factice qui ne les rend que plus redoutables. Mitifiau, qui prenait le titre de comte de Belair et se donnait pour le fils d’un général mort sous le premier empire, était un homme de manières irréprochables ; il allait dans le monde ; — j’entends le meilleur, celui qui se prétend exclusivement la bonne compagnie ; — il y vivait d’escroqueries, de vols habilement dissimulés et de bonne fortune au jeu (c’était le temps de l’écarté). Un jour, voulant tenter une plus grosse aventure, il fut arrêté au moment où il commettait un vol à l’aide de fausses clefs. Sa prison faite, il revint à Paris, et tomba dans la dernière abjection.

Quelques-uns d’entre eux sembleraient devoir être pour jamais arrachés au crime par les goûts élevés qu’ils professent et les occupations intellectuelles qui les sollicitent ; mais les instincts mauvais prennent le dessus et les jettent dans une vie déshonorante. C’est ainsi qu’un mathématicien, versé dans les plus hautes sciences et ne rêvant que spéculations abstraites, fut condamné à sept ans de réclusion pour vol avoué dans un magasin. L’éducation, l’instruction, les bons exemples sans cesse offerts par la famille s’émoussent sur certaines natures que le vice a coudées dés l’enfance. On n’a pas oublié le nom de ce riche orfèvre qui, s’apercevant qu’il était fréquemment volé, s’embusque près de sa caisse, tire un coup de fusil sur un homme qui ouvrait la serrure, et reconnaît son propre fils dans le voleur expirant.

Il faut parfois la sagacité extraordinaire et l’absence