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l’histoire d’Héloïse et d’Abeilard, très-vaste dans ses dimensions, elle a grand air et rappelle à la mémoire les vieux contes de chevalerie. La prison en elle-même est assez exiguë, car elle ne contient que 76 cellules, qui en temps normal suffisent au service ; elles ont, pendant l’année 1868, abrité les détenus qui étaient attendus à la cour d’assises ou avaient interjeté appel à la suite d’une condamnation correctionnelle. La partie de la prison réservée au service de la cour impériale se nomme la Conciergerie neuve, parce qu’elle a été reconstruite en partie et aménagée selon le nouveau système pénitentiaire.

La vieille Conciergerie a des souvenirs qui ont leur importance dans l’histoire : là est le cachot où fut enfermée Marie-Antoinette[1], celui qui vit passer Danton, le caveau où Robespierre blessé fut déposé, la salle où les accusés s’entassaient avant de monter au tribunal révolutionnaire. Cette dernière salle sert de chapelle aux prévenus ; le cachot de Marie-Antoinette est orné de peintures et d’inscriptions commémoratives. Les bâtiments qui l’avoisinent sont destinés à disparaître bientôt pour faire place à des constructions plus amples et mieux appropriées ; mais la cellule où la reine de France attendit la mort sera religieusement conservée. À quoi bon perpétuer de telles reliques, à quoi bon rappeler toujours à une nation les fautes qu’elle a commises et ne pas rejeter au néant ces souvenirs lugubres, inutiles

  1. Voici la copie de la levée d’écrou de la reine : Du vingt-cinquième jour du premier mois de l’an deuxième de la république française une et indivisible :

    « La nommée Marie-Antoinette, dite de Lorraine d’Autriche, veuve de Louis Capet, a été, à la requête du citoyen accusateur public du tribunal révolutionnaire, extraite de cette maison et remise à l’exécuteur des jugements criminels et conduite à la place de la Révolution pour y subir la peine de mort à laquelle elle a été condamnée par jugement du tribunal révolutionnaire en date de ce jourd’hui par nous huissier audiencier au dit tribunal soussigné,

    « Happier. »