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On crut à un prodige ; rien n’était plus simple. La sûreté avait été prévenue qu’un jeune homme, descendu au meilleur hôtel de Paris, avait le jour même de son arrivée fait cinq engagements au mont-de-piété ; elle avait été faire une visite chez ce voyageur si fort au courant du prêt sur gage, avait trouvé des malles où des bijoux étaient littéralement jetés en tas, et, flairant un crime, avait arrêté l’un et saisi les autres. Le plus curieux, c’est que la police anglaise, selon son usage, réclama le tiers de la valeur comme prime de capture, c’est à-dire 133 000 francs. Les tribunaux anglais la déboutèrent. Les négociants envoyèrent 30 000 francs à M. Claude, chef du service, qui naturellement les refusa.

La sûreté n’a pas pour seule mission la recherche des coupables en vertu des arrêts, jugements ou mandats de justice ; elle prévient la perpétration, autant que cela est possible ; elle arrête en cas de flagrant délit, aide le parquet dans les investigations urgentes et pour les renseignements à recueillir sur place ; c’est elle qui démêle d’abord les affaires embrouillées, afin que la justice y voie clair et puisse marcher vers son but avec quelque certitude. Elle assiste les commissaires de police dans leurs perquisitions ; de plus, elle rend compte de la conduite des repris de justice et des libérés en surveillance. Les ruptures de ban lui valent un surcroît de travail excessif. Grâce aux chemins de fer, tout individu interné en province a bien vite fait de rentrer à Paris, dans cette ville de son rêve perpétuel où il y a tant de cabarets, tant de filles, tant d’abris, tant de bons coups à faire ; on n’arrive pas seulement des départements, on revient de plus loin, de Cayenne et de la Nouvelle-Calédonie ; depuis 1852 jusqu’au 1er décembre 1867, 1 005 forçats se sont évadés de ces deux colonies pénitentiaires. Quelques-uns, comme Giraud de Gâtebourse, ont péri dans