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populations s’obstinaient à lui refuser ; mais on s’arrêtait là. Le blé ne pouvait sortir de France ; par les décrets des 5 et 8 décembre 1792, du 1er mars 1793, tout exportateur était frappé de mort ; les charretiers qui, pour obéir à leurs maîtres, conduisaient des grains destinés à l’exportation devaient être punis de six ans de galères. Ces lois farouches ne remédiaient guère à la disette.

En présence des violences qui les menaçaient sans cesse, les minotiers découragés renonçaient à toute tentative de négoce, et Pioland pouvait écrire avec raison, en date du 27 novembre 1792 : « Il n’est presque plus aucun citoyen qui puisse ou qui ose aujourd’hui se livrer au commerce des grains. S’il en fait transporter, on l’accuse d’accaparer ; des attroupements se forment, se portent au marché, taxent les grains, les enlèvent même sans les payer. » La municipalité de Paris avait acheté des farines et les faisait vendre à perte sur les marchés ; cette mesure pitoyable eut un effet auquel on ne s’attendait guère, elle dégarnit immédiatement les halles. « On vient, dit Roland, des districts voisins pour s’y approvisionner ; le commerce cesse de les alimenter de son côté, parce qu’il ne peut vendre au même prix. » Cela était élémentaire, et pourtant on devait plus tard renouveler la même faute qui amena le même résultat.

Cependant plusieurs membres de l’Assemblée, persuadés que tout le mal venait de la façon dont le commerce des céréales était compris, voulaient le réglementer à outrance. Alziary disait, dans la séance du 25 novembre 1792 : « Les pères de la nation doivent décréter la peine de mort pour quiconque, hors de la loi, osera traiter des grains comme d’une marchandise commerciale. » Le 2 décembre, Robespierre touche du doigt la vérité, lorsqu’il dit : « Dans tous les pays où la nature