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mentaires ont subi une augmentation qu’elles n’ont point perdue, quand la circonstance toute spéciale qui l’avait fait naître a pris fin. Sans atteindre encore des proportions inquiétantes, ce renchérissement successif des objets de consommation indispensables a de quoi faire réfléchir, et l’on peut se demander si les difficultés que le plus grand nombre éprouve aujourd’hui à subvenir aux exigences de la vie matérielle ne chasseront pas de Paris une bonne partie de sa population, devenue incapable de se nourrir suffisamment d’une façon normale et permanente.

Cette population si nombreuse, si intéressante à tant d’égards, qui se plaint non sans raison que les conditions d’existence ont été trop brusquement modifiées, est-elle bien raisonnable elle-même ? ménage-t-elle ses ressources de façon à ne pas se trouver prise au dépourvu et à pouvoir faire face aux mouvements ascensionnels et continus que dès à présent il est facile de prévoir ? On en peut douter. Une comparaison montrera d’une manière péremptoire quel genre de consommation particulière recherche la population, et que trop souvent elle sacrifie ses besoins à ses goûts. En opposant les uns aux autres des chiffres que j’ai déjà cités, on verra qu’il existe à Paris 1 286 boulangers, 1 574 bouchers, 11 346 cabarets, et qu’il faut ajouter à ces derniers 644 liquoristes et 1 631 cafés et brasseries. Il y a là un indice grave dont il faudra tenir compte lorsqu’on devra apprécier la légitimité des plaintes et qui mérite d’être jugé avec sévérité.

Il n’est guère en France de service mieux organisé que celui que l’administration appelle l’approvisionnement de Paris. Paris est difficile, accoutumé à tout trouver sous sa main ; on doit savoir satisfaire à ses exigences et même à ses caprices ; il est imprudent et insouciant ; on doit veiller sur sa santé sans qu’il s’en aper-