gourmets y sont pris, et l’eau-de-vie prend vingt ans en dix minutes.
La falsification des liquides s’opère presque toujours chez le détaillant, qui excelle à faire trois pièces de vin avec deux, grâce à un tiers d’eau. La préfecture de police a dans son service vingt-huit dégustateurs dirigés par un dégustateur en chef accosté d’un adjoint, dont l’unique mission est de goûter, de contrôler les vins et liqueurs dans tous les établissements qui en vendent, de découvrir les fraudes et de déclarer les contraventions. Ces employés assermentés ne sont admis qu’après examen ; leur métier n’est point une sinécure, car ils ont à Paris, en dehors de Bercy et de l’Entrepôt, 23 645 établissements à visiter, parmi lesquels il faut compter 11 346 marchands de vins au détail[1]. Autrefois les vins saisis étaient jetés au ruisseau devant la porte même du délinquant : mais bien des pauvres gens se précipitaient avec des éponges, des casseroles, des cruches, pour recueillir la liqueur bleuâtre et malsaine qu’on poussait vers l’égoût ; l’impression qu’on voulait obtenir tournait à mal, et l’on produisait précisément l’inconvénient qu’on cherchait à éviter. Aujourd’hui les choses se passent d’une façon moins théâtrale et amènent le résultat désiré ; les vins confisqués sont conduits à la Seine et rendus à la rivière, d’où bien souvent ils viennent en grande partie.
Lorsque Napoléon Ier décréta la construction de l’Entrepôt, la plupart des vins arrivaient par voie de navigation. Paris ne comptait (1811) que 622 636 habitants, la plupart des provinces consommaient elles-mêmes
- ↑ les autres établissements où l’on débite les liquides sont : marchands de vins en bouteilles et succursales, 883 ; — liquoristes, 644; — crémeries, 1 062 ; — fruitiers et marchands de comestibles, 924 ; — cafés et brasseries, 1 631 ; — traiteurs-restaurateurs, 2 093 ; — tables d’hôte, 444 ; — épiciers, débits de tabacs, 3 657 ; — frituriers et regrattiers, 256 ; débits interlopes, 103.