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rie d’une nouvelle espèce se désagrège, se décompose et devient immangeable. De plus, pendant la nuit et en grand mystère, car il faut éviter l’œil trop bien ouvert de la police, on porte de la viande de cheval chez les traiteurs infimes, qui en font des entrecôtes et des filets ; il n’est pas rare chez ces bouchers de découvrir dans quelque coin retiré une pièce de cheval piquée et prête à devenir du bœuf à la mode ; quand on surprend ces hommes en flagrant délit de colportage prohibé, ils répondent : « Que voulez-vous que nous fassions de notre viande, puisqu’on n’en vend pas à l’étal ? » Ce n’est point par de tels moyens que les marchands feront cesser le

    vant : « La rue Saint-Éloi, à Levallois-Perret, se compose de deux maisons. Dans l’une d’elles, portant le no 7, habitait, il y a quelques années, le nommé Avinain, boucher, qui fut exécuté comme auteur de plusieurs assassinats et comme convaincu de dépecer ses victimes, dont il tirait parti pour son commerce. Cette maison fut ensuite louée par un parfumeur de Paris, qui y établit une succursale assez importante. Ensuite, cette maison fut sous-louée par un sieur Perrin, se disant chimiste. Tout récemment, cet établissement, connu sous le nom de maison Avinain, devenait un foyer pestilentiel. Des exhalaisons putrides se répandaient dans le voisinage, et les habitants, pleins du souvenir du boucher, prétendaient que le locataire avait découvert des cadavres enterrés secrètement pendant la Commune, et qu’il les faisait fondre la nuit, dans une chaudière, pour les utiliser ensuite. Cette supposition avait déjà pris une certaine consistance dans le pays, lorsque le sieur Bonnin, se disant passeur administratif au pont de la Grande-Jatte, actuellement en réparation, déclara chez le commissaire de police de Levallois qu’il avait acheté de trois individus, les nommés Perrin, Bouchet et Binet, au prix de 55 centimes la livre, trois quintaux de saucissons, pour les revendre au détail aux maçons et aux nombreux pêcheurs qui fréquentent ces parages, et qu’il avait été indignement trompé, les saucissons étant corrompus. Ces marchandises furent immédiatement saisie ». Telle était la putréfaction de ces viandes, que les experts chargés de les examiner furent pris de vomissements et purent à peine accomplir leur triste mission. Une perquisition faite au domicile de Perrin fit découvrir un appareil au moyen duquel les viandes désossées étaient hachées et passaient dans des boyaux dont on formait des saucissons. L’enquête a constaté que la fabrique était alimentée par les chiffonniers et que ces viandes provenaient, détail écœurant, d’animaux domestiques morts, ramassés dans les rues de la capitale, tels que chiens, chats, etc. Perrin, ainsi que Bouchet et Binet, gens sans aveu qu’il s’était adjoints pour l’écoulement de ses produits, ont été arrêtés et conduits à la préfecture. Les saucissons et les détritus de viande trouvés dans la fabrique ont été, par mesure de salubrité, enterrés profondément. »