Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/61

Cette page a été validée par deux contributeurs.

noncé en dernier ressort, il n’y a qu’à s’incliner. Cependant je lis dans le code pénal un article 187 ainsi conçu : Toute suppression, toute ouverture de lettres confiées à la poste, commise ou facilitée par un fonctionnaire ou un agent du gouvernement ou de l’administration des postes, sera punie d’une amende de 16 francs à 500 francs et d’un emprisonnement de trois mois à cinq ans. Le coupable sera de plus interdit de toute fonction ou emploi public pendant cinq ans au moins et dix ans au plus. « Ce sont là de ces contradictions que les légistes excellent à résoudre, mais auxquelles nous n’entendons rien.

Au mois de janvier 1867, un incident vint tout à coup solliciter l’opinion publique, appeler son attention sur le secret des lettres et déchaîner une tempête d’une extrême violence. Les journaux s’emparèrent de la question, la discutèrent avec feu, et le Corps législatif, dans la séance du 23 février, eut à se prononcer sur une interpellation très-accentuée formulée par M. Eugène Pelletan. Quel événement avait donc motivé cette juste et légitime émotion ? Le comte de Chambord avait fait autographier une lettre dans laquelle il s’expliquait, je crois, sur la situation intérieure du pays. Cette lettre, mise sous enveloppe, avait été envoyée à un assez grand nombre de personnes en France. Le préfet de police, au lieu de fermer les yeux sur un pareil fait qui n’avait rien d’inquiétant, rédigea, en vertu des pouvoirs que lui confère l’article 10 du code d’instruction criminelle, une réquisition en date du 23 janvier 1867, pour faire saisir la susdite lettre dans les bureaux de poste. Le directeur général des postes, obéissant à la réquisition du préfet de police agissant comme magistrat, adressa, le 24 janvier, une circulaire à tous ses agents et leur intima l’ordre de saisir, partout où ils pourraient la reconnaître, la fameuse lettre signée Henry[1].

  1. Voir Pièces justificatives, 3 et 4.