Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/341

Cette page a été validée par deux contributeurs.

on construisit sur le quai du Marché-Neuf, à l’angle nord-est du pont Saint-Michel, un bâtiment carré spécialement destiné à l’exposition des corps inconnus. L’ouverture des nouveaux boulevards a singulièrement modifié ce quartier, et la Morgue est aujourd’hui reléguée à l’extrémité de la Cité, sur cet îlot depuis longtemps réuni à la terre ferme et qu’on appelait autrefois la Motte aux Papelards.

La salle d’exposition, garnie d’un vaste vitrage qui permet l’observation la plus attentive, contient douze dalles sur lesquelles les corps sont étendus au-dessous d’un robinet d’eau froide qui les arrose incessamment et en retarde la décomposition. À côté sont le greffe, la salle des autopsies, la salle des morts reconnus ou inconnus qui doivent être enterrés, les magasins où des casiers séparés, numérotés, étiquetés, renferment les vêtements trouvés sur les cadavres ou simplement recueillis dans la Seine, les égouts et les canaux, enfin la salle des gardiens et leur chambre de nuit. Nul cadavre n’est reçu à la Morgue si les gens qui l’apportent ne sont munis d’un ordre de réception délivré par un commissaire de police ; le procès-verbal de la découverte du corps et le rapport du médecin sont directement envoyés au cabinet du préfet.

Le cadavre une fois admis est déshabillé, lavé et exposé. L’énumération des différentes divisions qui servent de titres au livre du greffe explique comment cette lugubre comptabilité est tenue : Numéro d’ordre, — date d’entrée, — heure d’arrivée. — Noms, — sexe, — âge. — Signalement d’identité : lieu de naissance, état civil, profession. — Demeure : rue, quartier. — Vêtements. — Genre de mort. — Temps écoulé depuis la

    terre, prit son épée pour venger sa mort et eut le même sort que son galant ; ils furent tous deux exposés à la Morgue du Châtelet en cet état. » (Journal de Buvat, février 1717 ; I, p. 251.)