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singulièrement modifié la physionomie. Dans le principe, quand toute la ville était la Cité, il n’y en eut que deux, le Grand et le Petit, défendus chacun à leur entrée par une forteresse : le Grand-Châtelet, le Petit-Châtelet. Ces deux ponts suffirent aux besoins des Parisiens pendant treize ou quatorze siècles. Dès 1141, le Grand-Pont prit le nom de pont au Change, à cause des changeurs de monnaies qui, sur l’ordre de Louis VII, y avaient établi leurs boutiques[1] ; les eaux, les débâcles de glaces l’ont souvent emporté ; ses maisons furent démolies en 1786, à l’époque où l’on se décida à supprimer les habitations qui encombraient les ponts et les rendaient souvent dangereux. Il a été récemment refait de fond en comble pour continuer l’alignement du boulevard Sébastopol.

Un manuscrit[2] de la Bibliothèque impériale contient une miniature exécutée en 1345 qui représente le pont au Change ; il ne ressemble guère à ce qu’il est aujourd’hui ; ses arches sont embarrassées par des moulins, et ses bords disparaissent sous les masures qui les couvrent. C’était le pont par excellence à cette époque ; Guillebert de Metz en parle avec admiration : « Là demeurent les changeurs d’un costé et les orfèvres d’autre costé. En l’an quatorze cent, et quand la ville estoit en sa fleur, passoient tant de gens tout jour sur ce pont, que on y rencontrait adez ung blanc moine, adez un blanc cheval. » Il appartenait à trois juridictions diffé-

  1. Jean de Garlande, dans son Dictionnaire, écrit vers 1090, dit : « XV. Mercatores habitantes super Magnum Pontem vendunt capistra, lumbarias, ligulas, marsupia sive bursas de corio cervino, ovino, bovino, porcino. — XXXVII. Aurifabri sedent ante fornaces suas et tabellas super Magnum Pontem, et fabricant pateras de auro et argento, firmacula, monilia, spinctera et nodulos, et eligunt ad annulos granula et jaspides, saphiros et smaragdos. » — Voy. Paris sous Philippe le Bel (appendice), par II. Giraud, in-4o, Paris, 1837. Collection de documents inédits sur l’histoire de France.
  2. La vie de sainct Denys, ms. no 2 092.