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lors du grand massacre de 1418 que commandait Capeluche ; à la Saint-Barthélémi, pendant que Charles IX,

 Ce roy, non juste roy, mais juste arquebusier,
Giboyait aux passants trop tardifs à noyer,


elle a charrié dix-huit cents huguenots vers le quai des Bons-Hommes ; de nos jours, elle a porté jusqu’à la mer les livres, les manuscrits, les vêtements sacerdotaux, les vases de l’Archevêché, et pendant nos insurrections elle a roulé le corps de plus d’un combattant. Elle a sa légende amoureuse et sinistre ; sans Villon nous ne la connaîtrions guère :

 Semblablement où est la royne
Qui commanda que Buridan
Fût jette en ung sac en Seine ?…
Mais où sont les neiges d’antan ?


La tour de Nesle a fait place à l’hôtel des Monnaies, et les maris sont assez accommodants aujourd’hui pour que les grandes dames n’aient plus à faire jeter leurs amants à la rivière.

Ses inondations jadis ont été fréquentes et souvent terribles. La plus considérable dont l’histoire ait gardé le souvenir est celle de 1176 ; elle emporta tout, les deux ponts qui la traversaient alors, les moulins, les barques, les berges, les piles de bois et les maisons ; elle noya les troupeaux qui paissaient dans les îles. La population consternée se tourna vers le ciel, et l’évêque de Paris, suivi de tout son clergé, de tous les moines, du roi Louis VII accompagné de sa cour, vint solennellement sur la grève étendre les mains au-dessus de la rivière rebelle et lui montrer un clou qui avait percé les mains du Christ ; puis il lui dit : « Que ce signe de la sainte passion fasse rentrer les eaux dans leur lit et protège ce misérable peuple ! » La crue s’arrêta et la