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pas le loisir de la chercher. Il me semble que si l’on voulait symboliser les apparences de Paris, on construirait un vaste bâtiment carré dont l’intérieur serait occupé par une caserne ; sur le premier côté, on verrait un théâtre ; sur le second, un débit de tabac ; sur le troisième, un débit d’absinthe ; sur le quatrième, la guinguette de Mercier modifiée par la civilisation et appropriée au goût du jour.

Ce n’est pas seulement l’Europe, c’est le monde entier qui vient s’amuser à Paris, y dépenser son argent et y goûter avec facilité toutes sortes de plaisirs sur lesquels il est bon de fermer les volets. Le boulevard des Italiens est un centre d’attraction auquel on échappe difficilement. On accourt des quatre coins de l’horizon sous prétexte de devoirs à remplir, d’instruction à compléter, de relations à former ; mais il faut avoir un cœur d’airain pour résister à l’atmosphère ambiante, et les plus forts, les mieux forgés succombent. Qu’est-ce donc que les bosquets d’Amathonte, les forêts de Chypre et les jardins d’Armide ? que ferait-on aujourd’hui de cette horticulture mythologique ? on défricherait tout cela au plus vite pour y construire de bonnes maisons avec entresol et sous-sol, car nous avons mieux à offrir.

Qui ne se rappelle l’Exposition universelle de 1867 ? Certes, le grand bazar circulaire élevé au champ de Mars contenait des merveilles, mais pour arriver jusqu’à elles, que fallait-il traverser ? Qu’on se souvienne de ce jardin qui ressemblait à un champ de foire, et de cette première galerie, où, sous prétexte de couleur locale, des filles décolletées, maquillées, impudentes et provocantes, vêtues en Styriennes, en Bavaroises, en Espagnoles, en Hollandaises, versaient à boire aux passants, donnaient la réplique aux plus hardis et défendaient les approches de la science, de l’industrie, du