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Au delà de ces ateliers s’ouvre une longue cour, qu’on nomme plaisamment la Sorbonne des cochers. C’est là en effet qu’ils passent leurs examens et qu’ils prouvent s’ils sont aptes à conduire une voiture. La seule constatation de leur habileté ne suffit pas ; il faut qu’ils connaissent Paris, ce Paris multiple, enchevêtré, dont les rues changent de nom tous les huit jours et où Thésée se perdrait malgré le fil d’Ariane. On interroge le postulant. Soyez certain qu’on ne lui demande pas quelle route il suivra pour aller de la place de la Concorde à l’Arc-de-Triomphe ; mais on lui dira : Par quel chemin irez-vous de l’impasse Saint-Sabin à la rue de l’Épée-de-Bois ? Si le bachelier répond mal, il n’obtient pas son diplôme ; mais, dès qu’il a passé un examen suffisant, il est nommé cocher adjoint ; il a payé 25 francs pour prix des leçons de dressage qu’on lui a données, il dépose un cautionnement de 200 francs pour garantir le payement de ses futures amendes, il monte sur son siège, entre en circulation, et au bout de six mois, s’il n’a pas trop accroché, n’a pas trop injurié les passants, n’a pas trop volé l’administration, ne s’est pas trop grisé, ne s’est pas trop battu avec ses camarades, n’a pas trop gardé pour lui ce qu’on avait oublié dans sa voiture, n’a pas eu trop de démêlés avec la police, il devient cocher titulaire.

La Compagnie générale a deux ateliers de construction, l’un situé rue Stanislas, l’autre rue du Chemin-Vert. Nous visiterons le premier, qui couvre une étendue de 15 000 mètres de terrain. Les matières y arrivent à l’état brut ; elles en sortent sous forme de fiacres, de coupés, de victorias, de voitures de grande remise. Les bâtiments sont divisés en deux parties bien distinctes : les magasins et les ateliers proprement dits. Les magasins renferment en quantité considérable tout ce qui est nécessaire à l’attirail complet d’une voiture : drap pour